La scène politique néerlandaise s'illumine d'une nouvelle étoile. Le 29 octobre dernier, Rob Jetten, le leader des Démocrates 66 (D66), a su surprendre en prenant la tête des élections législatives. Sa campagne, axée sur des thèmes positifs et pro-européens, s'est démarquée par son approche pragmatique. À une époque où le populisme semble dominer, son message, centré sur des solutions concrètes sans effusion de projet démesuré, a trouvé un écho favorable auprès des électeurs. Le D66, d'inspiration sociale-libérale, a bénéficié d'une dynamique de dernière minute, amenant Jetten à s'installer confortablement en tête avec 27 sièges, devançant ainsi les populistes du Parti de la Liberté (PVV) de Geert Wilders.
EN BREF
- Rob Jetten, jeune leader des D66, remporte les élections législatives néerlandaises.
- Déclenchement d’un possible changement politique avec une coalition centriste.
- Les politiques de logement, climat et éducation au cœur de son programme.
Ce mardi, les premiers résultats ont révélé que le D66 comptait 26 sièges, à égalité avec le PVV, qui a perdu 11 sièges par rapport à la dernière législature. La victoire de Jetten ne fait pas que modifier la configuration politique. Elle marque également la fin d'une époque pour des leaders tels que Geert Wilders, qui a réagi en affirmant : « Nous avions espéré un autre résultat. Nous sommes plus déterminés que jamais. » Les libéraux du VVD, pilotés par Dilan Yesilgöz-Zegerius, se maintiennent avec 22 sièges, tandis que le Parti des travailleurs (PvdA) de Frans Timmermans essuie une déroute, tombant à 20 sièges, soit une perte de 5. Timmermans a annoncé sa démission immédiate après cet échec surprenant.
Un futur Premier ministre en vue
Rob Jetten, 38 ans, pourrait devenir le plus jeune Premier ministre des Pays-Bas. Les résultats provisoires laissent entrevoir l'impossibilité d'une coalition de droite à quatre partis ; un partenariat progressiste, regroupant D66, PvdA, VVD et CDA, s'annonce comme la voie la plus stable avec 86 sièges sur 150. Les discussions de coalition débuteront prochainement avec la nomination d’un « scout » qui se chargera de rassembler les leaders des partis.
Décrit par ses proches comme un « ingénieur politique », Jetten utilise une approche pragmatique et pondérée. Son style s'éloigne des discours enflammés de ses adversaires. Dans un contexte d'exaspération envers le discours politique traditionnel, sa réserve et son sérieux peuvent se transformer en atouts décisifs. Évoluant dans un paysage politique tendu, il se démarque par sa capacité à transcender les clivages, souvent perçue comme une fadeur par ses détracteurs.
Issu d’une enfance marquée par l’engagement
Né dans le Brabant-Septentrional, Jetten a grandi à Uden. Jeune, il aspirait à une carrière sportive avant de se tourner vers la politique, notamment après le meurtre tragique du cinéaste Theo van Gogh en 2004. Ce drame a été un déclic pour lui, le poussant à agir contre les stéréotypes qui touchaient son village. Ses efforts pour démontrer que la diversité et l’inclusion sont des valeurs fondamentales se reflètent dans sa politique actuelle.
Critique de l’immobilisme passé
Après des études à l'université Radboud de Nimègue, Jetten a rapidement fait son chemin dans les rouages administratifs, devenant président des Jeunes Démocrates puis conseiller municipal. Cette expérience l'amène à critiquer ouvertement l'absence de réformes significatives des gouvernements précédents. Lors d'une récente interview, il a déclaré : « Les Pays-Bas sont restés immobiles pendant quinze ans ». Ce constat d'immobilisme, tout en étant un reproche à ses prédécesseurs, souligne aussi son rôle dans ces gouvernements.
Ministre du Climat et de l'Énergie, Jetten a piloté des initiatives audacieuses, faisant face à des critiques tant des climatosceptiques que des ONG. Son approche est marquée par ce qu’il appelle le « pragmatisme à grande vitesse », permettant de jongler entre ambitions écologiques et contraintes budgétaires.
Un ambitieux projet de logement
La crise du logement est un enjeu majeur aux Pays-Bas. Jetten propose une stratégie audacieuse consistant à créer dix nouvelles villes et à industrialiser la construction. Les objections fusent : l'une de ces villes, Ustad, pourrait être érigée en gagnant des terres sur la mer, ce qui soulève des inquiétudes écologiques. Face à cela, il répond : « Cela ne peut pas être un rêve chimérique. » Pour Jetten, l’aspect pratique doit primer, avec la volonté de proposer 200 000 maisons sur le court terme.
Sur le sujet délicat de la migration, il prône une gestion pragmatique sans surenchère, tout en plaidant pour l’intégration des nouveaux arrivants dans la société néerlandaise. Son compagnon argentin, Nicolas Keenan, lui-même athlète, lui permet de comprendre les défis de l’intégration à travers un prisme personnel. Lors d’un entretien, il a déclaré : « Nous voulons que les nouveaux arrivants sachent où ils en sont pour bien participer. »
Alors que Rob Jetten se prépare à façonner l’avenir politique des Pays-Bas, sa capacité à naviguer dans un climat de tensions croissantes sera mise à l'épreuve. Quoi qu'il en soit, il semble bien décidé à construire un avenir où le pragmatisme et la coopération priment sur la division et la polarisation.