Laura Magné, jeune éditrice de 34 ans, évite Paris et les projecteurs. Évoluant dans les coulisses de l’édition, elle exerce une influence discrète mais percutante. En effet, elle est à l'origine de nombreux ouvrages qui suscitent la controverse, en particulier avec des auteurs issus de l’extrême droite et de la mouvance libertarienne. Sa maison d’édition, Magnus, qu'elle a cofondée avec l'écrivain Laurent Obertone, est devenue un creuset pour des voix jugées dérangeantes dans le paysage littéraire français. Au téléphone, elle se montre méfiante, indiquant qu’elle ne désire peut-être pas se retrouver trop exposée au jugement du public.
EN BREF
- Laura Magné, éditrice influente, évite les projecteurs malgré son rôle central dans l’édition.
- Elle défend la liberté d'expression tout en publiant des œuvres controversées de l’extrême droite.
- Sa maison d’édition Magnus promeut des auteurs atypiques loin des conventions du politiquement correct.
Laura Magné ne se contente pas d’être une simple observatrice, mais agit plutôt comme une actrice engagée. On lui doit des publications telles que Transmania, vendu à 23 000 exemplaires, et Suspecte, aux côtés d'auteurs comme Zoe Sagan. Elle a également pris la direction de La Furia, une revue satirique récemment sous le feu des critiques pour des contenus jugés excessifs. Les plaintes déposées par des associations comme SOS Racisme témoignent des débats qu'elle suscite, tant par ses choix éditoriaux que par son engagement en faveur de la liberté d'expression.
L'éditrice se dit être dans un « schéma plus familial que strictement entrepreneurial », cautionnant ainsi un cadre qui selon elle, valorise l’innovation littéraire. Son approche énonce clairement ses idéaux : défendre ses auteurs, peu importe les conséquences. Elle affirme : « tant que mes auteurs ne passeront pas sur le service public, l’équité d’expression ne sera pas respectée. » Une déclaration forte qui pose des questions sur le paysage editorial actuel et sur la définition même de la liberté d'expression. Mais jusqu'où peut-on aller dans cette quête de provocation ?
Un parcours atypique
Le parcours de Laura Magné est, à bien des égards, atypique. Après avoir arpenté les pages des magazines tels que Charlie Hebdo et Hara-Kiri, elle a été formée dans l'environnement parfois sulfureux des éditions Ring. C’est au sein de cette maison qu'elle a rencontré Laurent Obertone, dont le livre La France Orange mécanique a surpassé les 100 000 exemplaires vendus et a reçu les éloges de figures littéraires comme Michel Houellebecq. Ensemble, ils vont fonder Magnus, projet né le 19 juillet 2021, afin de publier des voix qu'ils jugent ignorées.
« J’ai peut-être un certain goût pour une forme de provocation », confie-t-elle. Cela ne l’empêche pas de provoquer un débat essentiel : la possibilité d’intégrer des auteurs aux opinions divergentes au sein de sa maison d’édition. Elle se dit ouverte à des propositions d’auteurs de tous horizons, voyant dans la diversité des voix un atout fondamental pour son projet éditorial.
La bataille des idées et des mots
La querelle des idées dans le monde de l’édition s'amplifie. Pour Magné, l'absence d’engagement pour une certaine couleur politique au sein de Magnus ne doit jamais occulter le rêve d’une plateforme d’expression. Au sein de sa maison, Georges Duhamel, un auteur de gauche, est bien accueilli par ses collègues. Pourtant, la perception d’un penchant marqué à droite reste prégnante. "Je ne suis pas d’extrême droite mais…" avoue un de ses auteurs, « ici, ce qui compte avant tout, c'est l'authenticité de la voix littéraire. »
Les critiques vis-à-vis de ses choix éditoriaux se nourrissent d'un cadre polémique. Laura Magné, lors d’interviews, a régulièrement rejeté les accusations de soutenir des idées extrémistes. Pour elle, sa maison d’édition est dédiée à la liberté narrative, à la condition que celle-ci ne tombent pas dans l’illégalité. Elle entend, par-dessus tout, défendre ses auteurs contre toute tentative de censure, en faisant valoir que chaque texte se doit d’être jugé dans son contexte.
Les défis sont donc multiples. Laura Magné navigue habilement entre le respect de ses convictions personnelles et la nécessité de faire entendre des voix considérées comme marginales ou provocatrices. La maison Magnus semble marquer un tournant dans l’édition contemporaine en offrant une scène aux voix qui prônent des idées souvent considérées comme inacceptables. Cette posture amène à une réflexion profonde sur les limites de la liberté d’expression et le rôle que doit jouer l'édition face à la montée de la censure dans diverses sphères sociales.