Invité de Quotidien le 6 octobre, le célèbre analyste politique Alain Duhamel a formulé un constat saisissant sur Emmanuel Macron, affirmant que le président de la République est « très intelligent, sauf en politique ». Pour Duhamel, qui observe la vie publique française depuis plus d'un demi-siècle, cette évaluation n’est pas seulement une critique, mais une analyse profonde des faiblesses politiques du chef de l’État. Bien qu’il soit manifestement un « professionnel de la présidence », Duhamel estime que Macron dispose d’un manque d’instinct et de culture politique qui le disqualifie dans l’arène des décisions politiques.
EN BREF
- Alain Duhamel critique Emmanuel Macron, le qualifiant d'intellectuel brillant mais d'amateur en politique.
- Les erreurs significatives de Macron incluent son refus de faire campagne aux législatives de 2022.
- Le manque de lien avec le terrain et une gestion politique insuffisante sont des points clés évoqués.
Duhamel insiste sur plusieurs erreurs fondatrices qui illustrent ce diagnostic. Il cite, entre autres, le refus de Macron de participer activement à la campagne des législatives de 2022, élément qui a conduit à une perte de pouvoir au sein du parlement. Pour Duhamel, c’est un tournant – ce moment où Macron, malgré une aura populaire, a choisi de ne pas se battre pour maintenir la majorité désirée.
La gestion des crises
Tout au long de son mandat, Macron a été confronté à des crises majeures, dont la plus marquante est celle des Gilets jaunes. Duhamel précise que même si les mesures ayant initié cette crise ont été prises par Édouard Philippe, la réponse de Macron à cette situation a révélé des failles dans sa compréhension des dynamiques politiques. Bien qu'il ait engagé un dialogue avec les citoyens, il a manqué de mettre en valeur les décisions positives prises en réponse à la colère populaire.
« Les erreurs de Macron sont publiques, ses réussites, secrètes », énonce Duhamel, soulignant ainsi le décalage entre la perception populaire et les décisions politiques prises en coulisses. Lorsqu'il évoque la situation de l'affaire Benalla, il précise que la gestion de ce scandale a également révélé un manque de maturité dans sa réponse politique.
Un style de présidence atypique
Pour Duhamel, l'approche de Macron au pouvoir ne se limite pas à un style de gouvernance, mais reflète un détachement vis-à-vis des réalités politiques. « Il fait grève de la politique », avance-t-il, insistant sur le fait que Macron semble plus préoccupé par la gestion administrative que par l’art de la politique elle-même. Contrairement à des figures historiques comme Charles de Gaulle, qui s'impliquaient activement dans chaque aspect politique, Macron semble souffrir d’un décrochement face aux enjeux du quotidien.
Cette absence de connexion est perçue par certains comme une forme de mépris pour les émotions collectives. Néanmoins, Duhamel nuance cette perspective en arguant qu’il n'y a pas de mépris conscient, mais plutôt une déconnexion due à un manque d’expérience dans le domaine politique traditionnel. Macron, malgré son intelligence et sa capacité à traiter des dossiers complexes, n'a pas su se connecter à l'instinct nécessaire pour gouverner avec cohésion.
Un héritage incertain
Alors que son mandat touche à sa fin, la question de l’héritage de Macron devient cruciale. Duhamel évoque un *regret partagé parmi de nombreux observateurs* : une occasion manquée de rassembler des forces politiques autour d’un centre solide. L’ambition initiale de Macron de créer un mouvement politique novateur a vu ses promesses se heurter aux crises sociales à répétition et à un paysage politique fragmenté.
Les élections européennes ont précisé cette désillusion, illustrant combien le parcours de Macron a été parsemé d'embûches et d'attentes déçues. Si son intelligence technique est évidente, la capacité à bâtir une culture politique durable s'avère totalement incomplète. Alors que les Français espèrent une stabilité politique, l’avenir reste incertain quant à la pérennité de l’héritage politique de Macron.