L'an dernier, Jean-Pierre Farandou a tenté de poursuivre son mandat à la tête de la SNCF, qu'il dirige depuis 2019. Cependant, le gouvernement a opposé un refus à cette demande. Quelques mois plus tard, le destin a, cependant, décidé de lui offrir une nouvelle opportunité : alors qu'il devait être remplacé par Jean Castex dans les semaines à venir, ce cheminot de cœur devient le ministre du Travail et des Solidarités du gouvernement Lecornu.
EN BREF
- Jean-Pierre Farandou, ancien PDG de la SNCF, est nommé ministre du Travail.
- Il est apprécié pour son approche du dialogue social, ayant réduit les conflits à son entreprise.
- Sa nomination surprend puisqu'il n'a pas d'expérience au sein de l'appareil d'État.
Cette nomination étonne. Nombreux sont ceux qui auraient plutôt vu Farandou, connu pour sa bonne communication avec les syndicats et son approche « cheminot première langue », occuper le portefeuille des Transports. Bien qu'ayant eu des interactions fréquentes avec le gouvernement, en particulier pour négocier le rachat de la colossale dette de la SNCF, Jean-Pierre Farandou n'a aucune expérience de gestion au sein de l'État. Ce qui joue en sa faveur, c’est son affabilité et son ouverture d'esprit. Les syndicats et une grande partie des cheminots ont su apprécier cet homme, attentif aux questions quotidiennes de son personnel.
Un homme au style différent
À la tête de la SNCF, Farandou, amateur de rugby, s'est présenté comme un leader très différent de son prédécesseur, Guillaume Pepy. Contrairement à ce dernier, qui avait un penchant pour les discours flamboyants et les apparitions médiatiques, Farandou a opté pour une approche plus humble et directe. Sa connaissance approfondie de l'entreprise, qu'il explore depuis 1981, lui a permis de se faire rapidement une place parmi les équipes, grâce à sa capacité à communiquer simplement, quel que soit le statut de ses interlocuteurs.
Lors de sa nomination en 2019, sa mission consistait principalement à apaiser une entreprise secouée par les turbulences des réformes passées. Dans ce contexte, il a réussi à limiter les conflits. En effet, durant son mandat, seuls deux conflits majeurs ont marqué son passage – et ceux-ci ne sont pas directement liés à sa gestion. L'un d'eux est survenu lors des mouvements sociaux liés à la réforme des retraites, dans le cadre d'un mouvement de grande ampleur, en 2019 et 2020.
Farandou a toujours eu une approche préventive face aux conflits. À quelques mois des Jeux Olympiques de Paris en 2024, il a signé un accord avec les principaux syndicats visant à améliorer le régime de retraite déjà favorable des cheminots. Cet accord, en quelque sorte, tempère les effets de la réforme des retraites soutenue par Élisabeth Borne en permettant aux cheminots de partir avant l'échéance prévue de 2026. Son objectif ? Calmer les ardeurs des syndicats qui menaçaient d'organiser des grèves durant cet événement d'envergure.
Toutefois, une ombre s'est glissée dans ce tableau : Farandou a commis la maladresse de ne pas informer son autorité de tutelle ni Bercy de cet accord. Cette gestion aurait pour conséquence un mécontentement notable de Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et des Finances. Ce dernier a notamment exprimé son désaccord avec cet accord en le qualifiant d'« insatisfaisant » et a évoqué un « dysfonctionnement » dans la communication.
Malgré cette tension, Farandou a assuré que l'accord pouvait être financé par les ressources de la SNCF. Néanmoins, cet impair lui aurait coûté son souhait de rester à la tête des cheminots. Ainsi, à 68 ans, il se retrouve avec un nouveau défi à relever, celui d’un portefeuille ministériel dont l'impact pourrait se révéler déterminant pour l'avenir du travail en France.