Les appels à la démission du président malgache, Andry Rajoelina, se multiplient dans l'île, secouée depuis bientôt trois semaines par un vaste mouvement de contestation.
EN BREF
- Des manifestations à Madagascar réclament la démission d'Andry Rajoelina, marquées par des violences.
- Une partie de l'armée exprime sa solidarité avec les manifestants, entraînant une escalade de la crise.
- Le président rejette les accusations de mauvaise gestion et appelle au dialogue tout en restant au pouvoir.
Une prise de parole tant attendue a eu lieu ce lundi 13 octobre, alors que le président malgache, Andry Rajoelina, s'est adressé à la nation après plus de deux semaines de crise. Ce dernier a tenté de justifier sa gestion face à une forte mobilisation populaire. Les manifestations, qui ont débuté le 25 septembre, entraînent un appel croissant à sa démission, tant parmi les civils que dans une partie de l'armée malgache.
Un mouvement de contestation initié il y a près de trois semaines
Les mobilisations à Madagascar, orchestrées par le collectif appelé "GenZ", visent initialement à dénoncer les coupures d'eau et d'électricité incessantes. Rappelons que 75 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon les données de la Banque mondiale. Toutefois, cette mobilisation sociale s'est rapidement transformée en un mouvement contestataire plus vaste, ciblant le gouvernement et le président Rajoelina, élu en 2018 et réélu en 2023 lors d'un scrutin controversé.
Les rassemblements ont atteint une ampleur significative, devenant les deuxième plus importantes depuis 1997, selon l'organisation Acled, spécialisée dans l'analyse des manifestations et des conflits.
Une mobilisation violemment réprimée
Entre le 25 et le 29 septembre, selon le Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU, au moins 22 personnes ont perdu la vie, tandis que plus d'une centaine ont été blessées. Volker Türk, représentant de ce bureau, a exprimé son choc face à la réponse violente des forces de sécurité. Rajoelina, de son côté, a avancé un bilan de 12 morts, qualifiant les victimes de "pilleurs".
Des images de brutalité ont également été rapportées, illustrant des manifestants frappés et blessés par les forces de l'ordre lors des manifestations. Reconnaissant des excès, certains officiers ont appelé à la "fraternité" entre les forces de sécurité et les civils.
Une partie de l'armée solidaire des manifestants
Ce week-end, le Corps d'armée des personnels et des services administratifs et techniques (Capsat) a diffusé une vidéo dans laquelle des militaires appellent à "refuser les ordres de tirer" sur les manifestants. Ces soldats, se ravissant de la situation, ont demandé à tous de "rejoindre le peuple" et de ne pas obéir aux directives les poussant à réprimer des compatriotes.
Un militaire, parlant au nom de ses camarades, a déclaré : "Les jeunes peinent à trouver du travail alors que la corruption s'accroît". Sur l'élan de cette solidarité, des soldats se sont intégrés aux manifestations, témoignant d'une ambiance festive lors de rassemblements en l'honneur des victimes.
Le président dénonce "une tentative de prise du pouvoir illégale"
En réponse à ces événements, Rajoelina a qualifié la situation de "tentative de prise de pouvoir illégale". Il a fait appel au dialogue comme seule solution à la crise actuelle. Malgré les rumeurs circulant concernant une possible fuite à l'étranger, son bureau assure qu'il demeure sur le sol malgache et qu'il continue de gérer les affaires du pays.
Dans un acte de défiance, le colonel Michael Randrianirina a affirmé que l'engagement de son unité aux côtés des manifestants n'était pas un coup d'État, mais une réponse aux revendications du peuple.
Ce phénomène de solidarité entre certaines factions de l'armée et les manifestants souligne la complexité de la crise à Madagascar, où les aspirations démocratiques et les enjeux politiques se télescopent dans un contexte fragilisé. Les semaines à venir s'annoncent décisives pour le pays, tant sur le plan politique que social. L'évolution de cette situation méritera une attention particulière de la communauté internationale.