Les inégalités de patrimoine en France demeurent très marquées en 2024, comme l'indique une étude récente de l'Insee, publiée ce mardi. Ces inégalités se révèlent plus prononcées que les disparités salariales et affichent même une légère hausse depuis 2015.
EN BREF
- Les inégalités patrimoniales en France s'accentuent depuis 2015.
- 5% des ménages détiennent plus de 1,27 million d'euros, tandis que 30% possèdent moins de 40 000 euros.
- Les disparités sont fortement corrélées à l'âge et à la catégorie socioprofessionnelle.
Au début de l'année 2024, 5 % des 31,1 millions de ménages français disposent d'un patrimoine brut supérieur à 1,27 million d'euros. En parallèle, 30 % de la population ne détient pas plus de 40 000 euros. Le Point résume ici les principaux enseignements à retenir concernant la répartition du patrimoine en France.
Un patrimoine brut médian de 205 100 euros
L'Insee souligne que « le patrimoine est très inégalement réparti dans la population ». En effet, la moitié des ménages détient environ 93 % du patrimoine brut total, tandis que l’autre moitié n’en possède que 7 %. Pour apporter plus de clarté : les 10 % des ménages les plus riches concentrent à eux seuls 48 % du patrimoine brut, alors que les 5 % d'entre eux détiennent presque un tiers.
En 2024, le patrimoine brut médian s'établit à 205 100 euros, tandis que le patrimoine net (après déduction des dettes) est de 148 100 euros. Les écarts sont significatifs : les 10 % de foyers les mieux dotés affichent plus de 857 700 euros de patrimoine brut, quand 1 % des ménages dépasse 3 millions d'euros. À l'opposé, 10 % des ménages ne possèdent qu'un patrimoine brut inférieur à 6 200 euros, et 20 % n'atteignent pas 16 500 euros.
Les inégalités patrimoniales s'avèrent donc nettement plus marquées que celles du niveau de vie. Ainsi, les revenus des 10 % les plus riches sont 3,5 fois plus élevés que ceux des 10 % les plus pauvres, alors que le patrimoine brut des 10 % les mieux dotés est 138 fois supérieur à celui des plus modestes.
Des disparités patrimoniales fortement corrélées à l'âge
Une autre observation émergente est la concentration du patrimoine parmi les générations les plus âgées. L'Insee explique que cette accumulation s'explique en partie par le temps qui s'est écoulé, permettant à ces populations de bénéficier de salaires plus élevés et d'héritages.
Le patrimoine augmente continuellement, atteignant son apogée autour de la soixantaine. À 62 ans, le patrimoine brut moyen est de 473 500 euros, comparé à 321 500 euros à 40 ans et 211 300 euros à 30 ans. À 80 ans, le patrimoine revient à 424 500 euros. C'est entre 30 et 45 ans que les ménages constatent des augmentations significatives de leur patrimoine, souvent grâce à l'acquisition de biens immobiliers.
L'immobilier, composante majeure du patrimoine français
Actuellement, l'immobilier représente environ 61 % du patrimoine moyen d'un ménage en France. Ce qui reste se compose principalement d'actifs financiers (22 %) et d'autres biens (tels que des véhicules ou du mobilier).
De nombreux ménages aux ressources limitées ne possèdent presque pas d'immobilier, s'appuyant uniquement sur des livrets d'épargne et des actifs résiduels. Pour les classes moyennes et une partie des classes aisées, la majorité de leur patrimoine réside dans leur résidence principale. Près de 90 % de ces ménages sont propriétaires de leur logement principal, tandis qu'un quart d'entre eux détient un autre bien immobilier. De plus, les ménages propriétaires affichent un patrimoine brut médian très supérieur à celui des autres ménages : 383 300 euros contre seulement 20 800 euros.
Quant aux ménages les plus riches, ceux qui se situent dans les 10 % supérieurs de la distribution, leur patrimoine est caractèrisé par une plus grande diversification, notamment sous forme de patrimoine professionnel, exacerbée chez les 1 % les plus riches, qui comprennent de nombreux entrepreneurs ou professions libérales, avec 36 % de leur patrimoine de nature professionnelle.
Une corrélation étroite entre patrimoine et niveau de vie
Les revenus des ménages influencent directement leur capacité d'épargne, comme l'indique l'Insee. Les plus aisés bénéficient fréquemment de revenus patrimoniaux, tels que des dividendes ou des revenus locatifs. En somme, le patrimoine brut médian croît avec le niveau de vie. À niveau de revenus équivalent, des inégalités persistent : parmi les ménages les plus modestes, 10 % détiennent moins de 1 600 euros de patrimoine brut, alors que pour les 10 % les mieux dotés, ce chiffre dépasse 306 400 euros.
Le patrimoine varie également selon la catégorie socioprofessionnelle. Les indépendants ont en général un patrimoine supérieur à celui des salariés ; ainsi, les agriculteurs affichent un patrimoine brut médian de 903 100 euros, tandis que les professions libérales atteignent 772 000 euros. À l'opposé, les ouvriers ne possèdent qu'environ 44 400 euros de patrimoine brut médian, tandis que les employés se situent autour de 46 200 euros.
La moitié des ménages français endettés
Bien que l'Insee ne prenne pas en compte les dettes dans le calcul du patrimoine brut, il est à noter que près de 46 % des ménages remboursent un prêt, souvent lié à l'achat immobilier. La moitié des ménages ayant un emprunt en cours doit rembourser plus de 49 200 euros, et 10 % d'entre eux ont un crédit dépassant les 263 600 euros.
Étonnamment, les ménages ayant le patrimoine le plus faible sont souvent moins endettés, car ils n'ont pas les moyens d'obtenir un crédit immobilier. Ils se trouvent donc souvent avec des dettes liées à la consommation (prêts étudiants, achats en plusieurs fois, etc.), comme le signale l'Insee.
Ce tableau des inégalités patrimoniales montre à quel point le paysage économique français continue de se polariser, laissant entrevoir des défis considérables pour les années à venir.