Scott Cooper : « Bruce Springsteen a probablement visionné notre film plusieurs fois ! »

Depuis plus de quarante ans, Bruce Springsteen a toujours refusé de prêter sa voix au cinéma hollywoodien. C'est avec un certain bonheur que Scott Cooper, réalisateur et scénariste, a réussi à briser cette barrière. Grâce à son approche originale, il a convaincu la légende du rock d'autoriser l'adaptation de sa vie, donnant ainsi naissance à Springsteen – Deliver Me from Nowhere, qui sort ce mercredi en salles.

Le film s'inspire du livre de Warren Zanes, qui raconte la création de l'album Nebraska, paru en 1982. À travers ce drame, Scott Cooper explore le paysage émotionnel du chanteur durant cette période cruciale de sa carrière. Le récit débute après la tournée de l'album The River, et plonge dans les tourments intérieurs de Springsteen, tiraillé entre le désir de succès et la fidélité à ses racines.

Les années 1980 marquent une époque de dilemmes pour Springsteen. Avec le potentiel d'un succès commercial énorme suite à The River, il choisit néanmoins de s’éloigner des éclats de la célébrité. Enregistré dans sa chambre avec un magnétophone 4 pistes, Nebraska est une réponse brutale et délibérée à la superficialité du monde musical de l’époque. C’est un album sobre, entièrement acoustique, qui s'est imposé comme un chef-d'œuvre.

Scott Cooper, dont l'adolescence a été profondément marquée par cet album, livre un film qui, bien qu’inégal par moments, réussit à capturer la sincérité et la vulnérabilité de Springsteen. L'interprétation de Jeremy Allen White, qui incarne le Boss, est particulièrement saluée pour sa puissance émotionnelle. La bande originale, composée de morceaux emblématiques tels que Born to Run et Atlantic City, permet aux fans de ressentir pleinement l'âme de l'artiste.

Lors d'une interview au Festival Lumière de Lyon, Scott Cooper a évoqué la nécessité d'aborder les questions de santé mentale à travers le prisme de la musique, soulignant que les difficultés de Springsteen résonnent avec celles de la société actuelle. « En Amérique, il y a une épidémie de problèmes de santé mentale qui touche toutes les classes sociales », a-t-il déclaré. Cette thématique est d'autant plus pertinente aujourd'hui, alors que le lien social est souvent fragilisé par un monde numérique en constante évolution.

Le film ne s'attarde pas sur les polémiques politiques que Springsteen a pu susciter, mais met l'accent sur le courage artistique qui l’a definie. « C'était un choix délibéré. Je voulais montrer l'homme derrière l'icône », explique Cooper. Loin des images spectaculaires, cette œuvre préférera se concentrer sur la vulnérabilité d'un artiste engagé et humaniste.

Cooper fait preuve d’humilité lorsqu'il parle du processus de création du film. « Cela n’a pas été difficile de monter ce projet, car tout s'est aligné », confie-t-il. La passion des producteurs et l'authenticité de Springsteen ont permis de donner vie à une vision artistique unique, loin des formats conventionnels souvent privilégiés par Hollywood.

Alors que les spectateurs retournent dans les salles obscures après une période difficile pour l'industrie du cinéma, le film de Scott Cooper pourrait bien les séduire par sa profondeur et son authenticité. Le défi est de capturer l'attention d'un public habitué au rythme effréné des contenus numériques. « J'espère que ce film réussira à résonner avec eux, à leur rappeler l'importance de la connexion humaine », souligne Cooper.

En définitive, Springsteen – Deliver Me from Nowhere ne se contente pas de retracer des événements de la vie d'une légende, il invite à un voyage introspectif, où les échos du passé résonnent avec les luttes contemporaines. Il s'agit là d'une œuvre à découvrir pour tous ceux qui souhaitent explorer non seulement l'histoire d'un artiste, mais également celle d'un homme et de ses démons intérieurs.

Springsteen – Deliver Me from Nowhere, de Scott Cooper (2h19). Sortie nationale le 22 octobre.