Le phénomène des délocalisations de matchs de football, bien que déjà engagé depuis plusieurs années, prend une ampleur inquiétante. Avec un engouement mondial pour le sport roi, de nombreuses rencontres opposant des équipes européennes sont désormais programmées aux quatre coins de la planète. Cette stratégie visant à exploiter la popularité du football à l'échelle internationale a ses limites. Elle soulève des préoccupations écologiques et, plus alarmant encore, elle menace l'intégrité des championnats locaux et l'attachement des supporters à leur équipe.
EN BREF
- Les matchs de football délocalisés mettent en danger l'authenticité et la tradition des championnats locaux.
- De nombreux joueurs, comme Adrien Rabiot, critiquent ces voyages futiles au détriment de la santé et du calendrier.
- Les supporters sont souvent lésés, perdant la chance d'assister à des matchs au profit d'un public éloigné des racines de ces équipes.
Ces derniers jours, les annonces de délocalisations ont fusé. La Liga a autorisé le match Villarreal-Barcelone à Miami, prévu fin décembre. Le Trophée des champions, traditionnellement opposé aux clubs champions de France, se déroulera au Koweït en janvier, tandis que la Serie A a planifié un Milan AC-Côme en Australie pour février 2026. Ces décisions témoignent d'une volonté manifeste d'amplifier l'impact commercial de ces événements. En effet, ces rencontres sont perçues comme des opportunités de générer des millions d'euros.
Le paradoxe s'intensifie lorsqu'on considère que ces matchs n'incluront pas les supporters locaux. Qui se soucie des abonnés s'ils ne peuvent pas assister aux matchs de leur équipe ? Les joueurs, quant à eux, sont contraints de jongler avec un calendrier déjà chargé, ajoutant de longues distances à leurs trajets pour répondre à des considérations mercantiles.
Le Trophée des champions a une tradition bien ancrée d'exportation du football français, ayant déjà conqueri des fanbases en Chine, au Canada ou encore au Gabon. Mais plusieurs observateurs s'interrogent : pourquoi ne pas exploiter les nombreux stades en France ou même dans les territoires d'outre-mer ? Ces lieux pourraient permettre aux fans de vivre l'événement dans de meilleures conditions en évitant des voyages incongrus.
Le mécontentement des joueurs
Adrien Rabiot, joueur de l'AC Milan, a exprimé son exaspération face à cette situation.
« C'est dingue de faire autant de kilomètres pour un match entre deux équipes italiennes en Australie. »
Dans ses déclarations, l'international français a souligné les préoccupations relatives aux calendriers et à la santé des joueurs, une question qui semble de plus en plus pressante.
Cependant, cette position n'est pas sans conséquences. Luigi De Siervo, directeur général de la Ligue italienne de football, a riposté, rappelant que les joueurs sont rémunérés pour cet engagement. Cette dichotomie met en lumière la tension existante entre les intérêts commerciaux des clubs et le bien-être des athlètes.
Impact sur les supporters et le football européen
Les avis divergent clairement au sujet de cette dérive, alors que les voix critiques parmi les joueurs restent rares. Les supporters eux, se sentent souvent spoliés. Ces rencontres délocalisées sont perçues comme une trahison des valeurs fondamentales du football, où ces matchs semblent avant tout destinés à attirer un public étranger, souvent peu attaché à ces équipes.
Certains s'inquiètent également du risque de déformer les championnats. Il est plausible d'imaginer qu'un jour, une finale de Ligue des champions puisse se dérouler loin des scènes traditionnelles, voire de l'autre côté de l'Atlantique. Cela soulève alors la question des véritables enjeux autour du football moderne : les clubs doivent-ils vraiment se montrer aussi souples en matière de déplacement au détriment de l’histoire et de l’identité locale ?
Ces interactions problématiques entre le football traditionnel et l'impératif commercial posent des enjeux majeurs pour le futur de ce sport. A l'heure où le profit semble primer sur les valeurs sportives, il devient primordial de s'interroger sur le sens même de cette passion qui nous unit. Le football est avant tout un spectacle, mais il doit aussi demeurer un lien social entre les territoires et leurs passionnés.